D’abord qu’est-ce que la laïcité ? La laïcité est basée sur 3 principes essentiels :
- La LIBERTÉ de conscience et celle de manifester ses convictions dans les limites du respect de l’ordre public. Elle garantit aux croyants et aux non croyants le même droit à la liberté d’expression de leurs convictions. Elle assure aussi bien le droit d’avoir ou de ne pas avoir de religion, d’en changer ou de ne plus en avoir.
- La SÉPARATION des institutions publiques et des organisations religieuses, elle garantit le libre exercice des cultes et la liberté de religion mais aussi la liberté vis-à-vis de la religion. De la séparation se déduit la neutralité de l’État, des collectivités territoriales et des services publics et non de ses usagers.
- L’ÉGALITÉ de tous devant la loi, quelles que soient leurs croyances ou convictions.
La laïcité ce n’est pas une opinion parmi d’autres mais la liberté d’en avoir une, ce n’est pas une conviction mais un principe qui les autorise toutes sous réserve du respect de l’ordre public.
Nous retrouvons l’instauration de la laïcité dans le texte de la Déclaration universelle des droits de l’homme (Nation Unies, 10 déc 1948).
Article 18 : “toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion; ce droit implique la liberté de changer de religion ou de conviction ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction seule ou en commun, tant en public qu’en privée, par l’enseignement, les pratiques, le culte et l’accomplissement des rites.
Article 19 : “ tout individu a le droit à la liberté d’opinion et d’expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir, de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d’expression que ce soit”
Et regardons ces 2 articles de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen (4 août 1789).
Article 10 : “Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par la loi. »
Article 11 : « La libre communication des pensées et des opinions est un droit les plus précieux de l’Homme : tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement sauf à répondre de l’abus de cette liberté dans des cas déterminé par la loi. »
Ces 2 articles sont repris plus précisément et approfondis dans les articles 9 et 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (4 nov 1950) que je vous invite à lire également.
Jean Picq, Magistrat, indique que “la laïcité est, avant toute chose, la reconnaissance d’un espace pluraliste dans lequel coexistent et s’affrontent des convictions philosophiques et religieuses. (…) la laïcité ce n’est pas d’établir une nouvelle religion laïque, qui proscrirait toute religion, c’est permettre à toutes les religions sans exception de vivre dans l’espace public et d’y faire entendre leur voix. »
Avant de faire une conclusion sur cette question il reste 2 éléments à élucider.
On parle dans ces articles de l’ordre public et de l’espace public, mais c’est quoi précisément ?
L’espace publique c’est évidemment les rues, routes, chaussées publiques, mais ce sont aussi des lieux ouverts au public, que l’accès soit libre (plages, jardins, promenades publiques…) ou soumis à condition, dans la mesure où toute personne qui le souhaite peut remplir cette condition (magasins, restaurants, théâtres, cinémas…et donc festival également).
Quant à l’ordre public, la notion juridique de celui-ci rejoint traditionnellement celle du sens commun. Il s’agit premièrement d’assurer “le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité”
La sécurité publique recouvre donc la prévention des risques d’accident, de dommage aux biens et aux personnes. La tranquillité publique consiste à préserver le “calme des citoyens” par la lutte des nuisance sonores les tapages nocturnes ou contre les troubles liés au déroulement de manifestation par exemple. La salubrité publique couvre la prévention des risques en matière d’hygiène et de santé publique.
Le dernier élément c’est le prosélytisme, celui-ci est par définition le fait de tenter de convaincre autrui d’adhérer à ses idées, et ça nous le voyons et pratiquons tous régulièrement. Le fait de dire qu’une bière est nulle comparée à une autre sur le festival, ou de dire que le heavy c’est pourri en essayant de convertir son pote fan de death à ses goût musicaux c’est également du prosélytisme 😉 Le prosélytisme n’est pas interdit en soi, c’est le comportement abusif qui pourrait l’accompagner qui peut être sanctionné. La Convention européenne condamne les abus et les contraintes (physiques ou morales), mais pas le prosélytisme courtois.
En conclusion, nous sommes dans un pays laïque mais les citoyens ne sont pas laïques à proprement parlé. La loi prend en considération cela et tient à le faire respecter. Alors avons-nous le droit de vous parler de Dieu au Hellfest, en pleine rue ou ailleurs ?
Oui parfaitement tant que nous respectons également la liberté de mouvement des personnes, leur liberté de ne pas nous écouter, celle de débattre avec nous… Nous avons, comme vous, la liberté de faire circuler nos idées, la diversité des opinions et nos convictions qui donnent de la richesse dans l’échange, la tolérance à l’égard de l’autre.
Les croyants ne sont pas exclus de la libre expression de leurs convictions dans l’espace public tant qu’ils respectent les libertés de chacun, ce n’est donc pas une tolérance de l’État mais bien un droit qui nous est donné à chacun. Nos convictions, tout comme les vôtres, ne restent pas derrière la porte de la maison mais nous accompagnent dans l’espace public.
Donc oui nous pouvons vous partager en toute légalité nos convictions et nous le faisons avec plaisir, c’est à vous de décider de ce que vous faites de notre partage avec vous ;).
